mercredi 11 septembre 2024
Paradisiaque
jeudi 6 juin 2024
Manges tes legumes!
Moi, c'est Thomas, j'ai 13 ans et je suis en 6eme. Oui j'ai redoublé, et si vous me lisez c'est parce que je suis en train de gentillement griffonez en classe pendant le controle de math.
Je ne suis pas le seul à ne pas faire ce que je devrais, regardez madame "Sentezmonkiki", (on l'appelle ainsi parce que son vrai nom c'est Santarnaki, c'est plus drole dit comme ça) elle aussi devrait nous surveillez ou que sais je mais elle préfere se mettre du vernis sur ses ongles de pieds.
Vous entendez la cloche ? Ca y est on est libéré, je ne pouvais plus attendre si longtemps. En parlant d'attendre, c'est ma grande soeur, Mélanie, qui n'est toujours pas là, comme d'habitude.
En plus, je doit rentrer avec elle car c'est elle qui vient toujours me chercher et m'accompagner à l'école alors que c'est une fille, la honte devant les potes.
Aprés 10 minutes, elle arrive enfin, main dans la main, avec son petit copain, "Sylvain", qui l'accompagne partout comme un petit chien.
A la maison, c'est toujours pareil, ma soeur veut jamais me laisser la télécommande alors on se dispute.
Tout ça parce que les parents sont absent et qu'elle veut fait son intéressante devant son amoureux.
Pas décidé à me laisser faire je lui arrache des mains mais trébuche sur la table basse. La zapette vol en l'air et retombe sur le sol en éparpillants les piles.
Dans ma chute, j'ai quand meme reussi à changer de chaine mais pas celle que je voulais.
Au lieu de quoi, y a cette publicité pour une émission concours de cuisine qui tourne en boucle. Papa et Maman regarde tout le temps.
Je dois dire que je ne comprend pas cet engouement des adultes pour ce genre de programme, au meme titre que personnes ne ferait un concours de menage ou de vaiselle, la cuisine c'est avant tout une corvée!
Tandis que ma soeur monte avec son Sylvain dans sa chambre à l'étage pour se faire des bisous, BEURK, moi je m'installe à table pour gouter.
Quand ma mere arrive du travail, elle éteint la tv et me demande de faire mes devoirs car on aura pas trop le temps ce week end vu qu'on doit rendre visite à mes grand parents.
Comme un dimanche sur deux, on va manger chez papi et mamie.
Bien souvent, la route est bouchonnée alors mon pere arrete pas de ralé pendant le trajet.
On a presque failli louper l'heure du déjeuner mais heureusement Mamie n'avait pas fini de cuisiner.
Elle nous a préparé ce "légume" (encore lui) farcie dont il parle tout le temps en ce moment à la Télé mais moi ça me donne pas trop envie.
Et mon pépé me dit que manger de ce légume ça rend heureux qu'il parrait mais j'y crois pas trop.
On dit aussi que les carottes ça rend aimable et que ça donnent les fesses roses, que les épinards rendent costaux, moi par contre j'ai surtout remarqué que les asperges vous donne le pipi qui puent et les betteraves donnent une couleur rouge à votre caca.
Du coup, je mange toute la farce et le riz mais pas le legume. Me dit vraiment pas, ce truc là.
Ca n'échappe pas aux grands yeux vitrés de ma grand mere qui me demande : "Ben alors Thomas, tu manges pas les bons légumes du potager de mamie ?"
A Maman de surencherir "fais pas ton difficile, allez mange!" et Papi qui était jusque là absorbé par la lecture de son journal d'intervenir ""tu vas pas encore nous faire ça! Y en a marre de ce cirque à la fin!".
Dos au mur et face à leurs insistances, je fais ce que tout bon petit frere ferait sans hésiter : balancer sa grande soeur.
"Mais regardes! Mélanie, elle a pas fini sont assiette!"
"Ta soeur mange de tout et a eu l'autorisation de quitter la table, elle."
"pour aller appeler son petit ami au toilette!"
Je profite de la diversion momentané que m'offre les petites cachoteries de ma soeur, que toute l'attention soit attiré sur ce qu'elle fait au toilette, pour donner les restes de mon déjeuner à Titus le chien de mes grand parents. Ni vu, ni connu. Façon au point ou il en est, (son ventre touche le sol si bien qu'il ne peut plus courir) un peu plus ou moins, personne ne le remarquera.
Sur la route du retour, la circulation est étrangement fluide, surtout pour un dimanche et dans ce sens là, habituellement, c'est compliqué si on part pas avant 18h.
De fait, mon pere est tout joyeux derriere son volant, je crois même l'avoir entendu siffloter. Vous imaginez ça vous?
En branchant ma console de jeu sur la télé de ma chambre je tombe encore sur une publicité pour ce maudit légume! A moins que ce ne soit un fruit ?! Dans la chanson de la publicité ils disent que ça se mange aussi bien sucré que salé. C'est a n'y rien comprendre. En plus, c'est rose à l'intérieur, on dirait quelques chose de chimique.
En zappant de chaine, je vois qu'ils font meme des regimes minceur avec...la Ubiktarine!
Ce soir, j'ai réussi a esquiver le diner en pretextant ne pas me sentir "dans mon assiette" et contre toute attente, maman m'a laissé tranquille.
Mieu que ça, elle m'a même monté un plateau avec un bol de soupe et des croques monsieurs. Ca a été trés dur de resister, car c'est mon plat préféré - ça et les coquilettes au jambon - mais je prefere rester prudent et piocher dans mon tiroir à cassecroutes. Alors je mange des chips et des bonbons acidulés en jouant à la console jusqu'à tomber de fatigue.
Oh non! J'ai loupé le reveil!...Enfin, j'ai completement oublié de le mettre plutot. Je suis en retard pour l'école, Maman va me passer un de ses savons!
J'entend deja les reproches qu'elle va me faire "tu joues trop à la console, si tu continue comme ça mon garçon, tu vas redoubler! bla, bla, bla...vous voyez le genre.
En prenant à peine le temps de me preparer, je descend l'escalier, sur la pointe des pieds.
Personnes à l'horizon. Je profite de l'occasion inespéré pour filer discretement.
Dans ma fuite, je sens une main me tapoter l'épaule.
Lentement, je tourne la tete pour regarder par dessus mon épaule et peut etre faire face à la menace, quand je réalise que c'est ma mère!
Elle a ce sourire étrange sur son visage, cette expression qui ne collerais pas normalement avec la situation.
Je m'attend à ce que maman me gronde severement mais elle n'en fait rien.
Non, à ma grande surprise, elle me tend un petit sachet en papier.
"Tiens mon chéri, je t'ai préparé un petit en cas, tu n'aura qu'à le manger sur la route, allez, file, tu es déja très en retard." qu'elle me dit tendrement en m'embrassant le front.
C'est pas tout mais je dois me pressé moi pour pas avoir plus de retard que j'en ai déja alors je prend un raccourci par le centre ville.
En passant devant le primeur je remarque que beaucoup d'adultes font la queue patiemment pour acheter le fameux légume.
La file d'attente s'étend jusqu'à l'extérieur du magasin et c'est aussi le cas du supermarché à l'angle et de la petite épicerie de monsieur Martinez un peu plus loin.
Dans le calme et la bonne humeur. Tout l'opposé de ce qui s'est passé pendant le grand confinement, vous vous rappelez, avec le corona machin chose, c'était la panique et la terreur.
Enfin arrivé à l'école! Je me faufile discretement à l'intérieur du batiment et me décide à ouvrir le sac qui contient le petit en cas que maman m'a préparé, à la forme du papier alluminium qui sert d'emballage, je reconnais la forme d'un sandwich.
Il y a cette tache rose qui dégouline un peu et je comprend alors que c'est un piege, une sorte de cadeau empoisonné quand soudain quelqu'un me l'arrache des mains.
C'est Axel, un garçon de 3eme avec deux de ses copains, Simon et Baptiste. Je ne les avait pas vu se glisser derriere moi et maintenant il m'encercle.
Pour qu'il me laisse tranquille je leur donne mon gouter sans trop tergiverser. Satisfait de leur méfait, ils finissent par s'en aller en rigolant bruyament, loin de se douter que cette fois c'est moi qui me suis joué d'eux!
Depuis le temps qu'ils m'embettent ces trois la, j'aurais aimé leur faire ça avant, mais avec du laxatif, ça aurait été encore plus drole!
J'arrive prés de ma classe et colle mon oreille sur la porte : pas un bruit, silence total.
La sonnerie me fait sursauter, par reflexe je m'écarte de l'entrée, m'attendant à une sortie brutale semblable a celle qu'on observe quand un prédateur approche d'un troupeau d'animaux sauvage.
Bien au contraire, rien de tout ça ne se produit, mes camarades sortent de la salle de classe dans le calme avec une discipline quasi militaire.
Alignés deux par deux, ils marchent en direction du refectoire, quant à moi, je leur emboite le pas puis m'insére dans le rang.
Le plus bizare, c'est à la cantine, d'habitude y en a toujours un qui dépasse les autres en grugeant la queue mais pas aujourdhui, non.
Tout ça me fait penser au sujet du cour d'histoire de la semaine derniere, celui sur le communisme.
Comme les autres, j'attend patiemment que mon tour vienne en tenant mon plateau dans mes mains.
Au moment ou j'arrive à hauteur de la dame qui sert, je découvre sans vraiment de surprise que l'ubiktarine, le légume est au menu, partout, dans tous les plats et sous toutes les formes : en soupe, en purée et même en frites pour paraitre plus appetissant!
Et le seul plat qui n'en contient pas pas c'est les epinards en branche, car de toutes maniere personne ne veut en manger généralement.
Avant de retourner en classe, je fait un petit arret par les toilettes pour la grosse commission.
Habituellement, c'est trés sale dans les cabines mais aujourd'hui c'est surprenament propre, pas de traces de caca dans la cuvette ou de papier toilette par terre, ce genre de chose quoi.
Pour passer le temps, je regarde des videos sur mon téléphone et je tombe sur l'une d'elle qui m'interpelle, on y voit deux hommes en cagoule qui discute face caméra : "C'est un vrai probleme de santé publique et ni les politiques, ni les religieux ne semblent prendre la mesure du phénomene. On dirait que Les consomateurs finissent par devenir eux même des légumes. Une fois contaminés, on le voit, ils ne font que vanter les bienfaits du produit betements, sans plus de sens critique, persuadé d'etre dans le bon. Je ne saurais dire si on assiste là à une opération de brainwashing ou de greenwashing, peut etre meme la combinaison des deux." La sonnerie retentit et me fait sursauté, j'en ai presque failli faire tomber mon telephone dans le trou! Je me depeche de regagner la salle de classe avant que mon absence ne soit remarquer.
17h tout pile, la fin des cours a sonné, mes camarades sortent dans le meme calme et silence qu'à la pause déjeuner.
Une fois de plus, j'attend Mélanie, ma soeur, qui est en retard.
Et quand elle fini enfin par arriver, elle pue la fumée. N'importe qui le remarquerait, sauf mes parents apparement, bien qu'on les embrasses en rentrant à la maison, allez comprendre!
Je monte dans ma chambre pour "faire mes devoirs" comprenez "jouer à la console", mais aucun de mes copains n'est en ligne du coup je me surprend à ranger mes affaires par ennui, j'en viendrais presque à ouvrir mon agenda et reviser mes cours, vous imaginez ça?
C'est a ce moment là, que ma soeur fait irruption dans ma chambre et sans frapper en plus!
Décidement je vais de surprise en surprise!
Mélanie ferme la porte doucement derriere elle, qu'elle vérrouille avec précaution puis se dirige rapidement vers moi pour me mettre la main sur la bouche et m'empecher de raler.
"Chut, pas un bruit, ils vont nous entendre." me murmure-t-elle avant de relacher son etreinte.
"Mais qu'est ce que tu fais?!" que je lui demande en m'essuyant la bouche.
"Suis moi" me dit elle en ouvrant la fenetre pour se hisser sur le toit.
Alors je me retrouve à marcher lentement sur les tuiles jusqu'à la cabane que j'ai construite dans le grand arbre du jardin.
Ma soeur allume une cigarette pour se rechauffer car le jour commence déja à tomber et la température avec.
Elle me propose de fumer et comme je veux faire le grand j'accepte.
Ca peut paraitre bete mais j'ai toujours aimé jouer avec ma respiration quand il fait froid alors j'imagine que ça doit etre un peu pareil.
"Mélanie, comment ça se fait que les parents ne t'ont jamais rien dit ni senti ?"
"Je sais pas, je dois avoir de la chance. T'avises pas de me balancer, sinon je leur dirais que toi aussi."
"Ouai et je dirais que c'est toi qui m'a fait essayer!"
"Pas bete, tu marques un point frérot."
Sur ce, elle me crache sa fumée au visage et prend de grands air fier pour me raconter ce qui suit :
"Tu vois, après les cours, je traine souvent avec des mecs du lycée, eux ils fument aussi mais pas de la cigarette." Ma soeur rigole toute seule betement avant de poursuivre.
"Bref, tout à l'heure, je sechais les cours avec eux, et y en a un qui parlait de l'ubiktarine.
Il parait que ce légume ou ce fruit, enfin peu importe ce que c'est vraiment, serait à l'origine un champignon extraterrestre qu'une secte vegane aurait trouvé dans un volcan.
Tout le monde semble accro à ce truc, d'une maniere ou d'une autre, je sais pas pourquoi. Ils errent sans but avec leur regards vides comme des zombies."
"Oui et ils ont cette maniere de parler étrange en "on""
"Toujours à utiliser la 3eme personnes du singulier!"
"Oui, voilà!"
"Puis, regardes, les influenceurs en font la promotion sur leurs reseaux sociaux avec leur sauce rose, pareil pour les chaines de fast food avec leurs sandwichs! Et justement, pendant qu'on discutait, y a un des lycéens qui a sorti un petit sachet contenant de l'ubiktarine séché et il commencait a rouler un joint avec."
"C'est quoi un joint?" que j'interroge ma soeur.
"heu ben, c'est une cigarette qui fait sourire!"
"Ah d'accord. Et comment on va faire pour éviter d'en manger ?"
"Ben moi, je me fais vomir à cause de...et parait que le soda ça aide aussi à le détruire mais pas du light hein! Je pense que c'est surtout roter qui marche."
"En retenu, j'ai entendu dire que les bonbons acidulés et aussi les..."
"A TABLE LES ENFANTS!!!!"
Soudain, le silence de nos chuchotements et même le vent est troublé par ce cri qui déchire la nuit, ce son que tous etre humain connait, que chacun pourrait reconnaitre entre mille, celui d'une mere qui appele ses enfants pour manger.
C'est d'autant plus étrange que habituellement, personne ne mange vraiment a table chez nous.
On se précipite de rentrer par la fenetre de ma chambre pour ensuite descendre l'escalier comme si de rien n'était.
Cette fois-ci, je suis coincé, face à Maman et Papa qui me font les gros yeux, je ne peux pas me dérober ou donner discretement ma nourriture au chien.
J'envisage un instant de faire tomber mon assiette mais renonce finalement quand mon pere m'averti de sa voix grave : "attention ou tu vas etre privé de dessert, j'ai fait de la panna cotta au fruit rose!" en repoussant mon assiette loin du bord de la table.
Qu'est ce que vous voulez que je fasse ? Me faire vomir comme ma soeur ?
Je fini d'avaler la derniere bouchée, c'est vrai que le gout est plutot agreable mais je dois faire vite pour lempecher de me contaminer.
En sortant de table, je monte vite à l'étage et m'enferme dans la salle de bain.
Je me force à roter mais j'entend ma mere à travers la porte qui me rapelle sur un ton de reproche que "ce n'est pas polie de roter" alors je met mes doigts dans ma bouche pour essayer de vomir et ça marche. C'est à la fois ce que j'esperais et ce que je craignais.
Maintenant, c'est encore pire, me voilà avec le gout de l'ubiktarine dans la bouche accompagné d'un arriere gout acide et pourri.
Pour faire passer ça, je me brosse les dents dans tous les sens, meme la langue et je manque de me faire à nouveau vomir.
En plein milieu de la nuit, une aigreur d'estomac me sort de mon sommeil, je fouille dans mon tiroir à casse croutes mais je n'ai pas grand chose à me mettre sous la dent à part ce paquet de chewing-gum. Comme je soupçonne ma mere d'avoir peut etre trouvé ma cachette secrete, je le repose dans le tiroir.
Mon ventre gargouille de plus belle, pas d'autre choix pour moi que de descendre à la cuisine.
J'avance a pas feutré dans l'escalier, enfin j'essaye, mais à chaques pas que je fais sur les marches, le bois craque bruyament.
Il y a aussi, les placards qui grincent et claquent quand je les ouvre pour inspecter leurs contenu. C'est dingue comme tout les petits bruits du quotidien paraissent soudain plus fort la nuit. A la lueur de mon telephone portable, je constate que tous les produits contiennent désormais de l'Ubiktarine, sans exception.
Du sucre aux pates en passant par les céréales et les gateaux : il y en a partout! Voyons voir, je suis sur que c'est le meme le cas dans le frigo.
AHHHHHHH!
Je sursaute, surpris par l'apparition du visage fantomatique de ma mere dans la lumiere blanchatre des néons.
"Qu'est ce que tu fais en plein millieu de la nuit à fouiller dans la cuisine mon garçon?"
Bien sur, j'avais prévu la possibilité qu'une telle situation se produise alors j'ai fait semblant de ne pas entendre et de continuer ce que je faisais, comme si j'étais en pleine crise de somnanbulisme. Ca m'est déja arrivé plusieurs fois et maman le sait, il ne faut jamais reveillé un somnanbule.
Au petit matin, je me reveille avec toujours cette même faim que la veille, un besoin devorant de croquer la vie à pleine dent!
L'odeur de pancake chaud de maman me sort du lit et me pousse a dévaler les escaliers à toute vitesse.
J'ai tellement faim que si je m'écoutais je mangerais bien un enorme bol de cereales arosé de chocolat chaud et dans lequel je tremperais mes pancakes avec de la creme!
Finalement, je me contente de manger mes pancakes avec de la pate a tartiner.
"Ton appetit fait plaisir à voir, fiston!" dit mon pere en me caressant les cheveux avant de s'installer devant la télévision.
Il zappe les dessins animés pour mettre une de ces chaines d'informations, vous savez celle avec ces emissions insuportable ou les gens ne font que se gueuler dessus à longueur de journée.
Bien que cela ne pourrait venir troubler mon incroyable bonne humeur du jour, la publicité vient m'apporter un peu de répit, surtout à mes oreilles.
C'est qu'elle en serait presque reconfortante et utile pour une fois! Etrangement, mon attention est attiré par ce slogan pour un dentifrice à l'ubiktarine : "C'est bon pour l'haleine, c'est plein de vitamine et ça rend la vie plus belle." et ça me donne envie subitement de me laver les dents.
dimanche 31 mars 2024
Dépossédés
vendredi 1 mars 2024
Sourire figé
Il y a des personnes avec qui vous avez un lien si fort qu'elles pourraient bien se trouver à l'autre bout de la planète que vous auriez toujours l'impression d'être aussi proche.
Comme si vous communiquiez par la pensée. Ceux qui ont perdu ou connu quelqu'un qui était dans le coma savent de quoi je parle.
J'enserre sa main avec les miennes pour la réchauffer et lui murmure "mon amour, c'est l'heure du bain" au creux de l'oreille.
Parce qu'elle ne peut pas bouger c'est moi qui doit m'occuper de sa toilette.
Je pose le bouchon au fond de la baignoire et y fait couler l'eau jusqu'à ce quelle soit chaude et suffisamment remplie puis reviens vers ma femme.
Non sans difficulté, je la porte jusqu'à la baignoire et la dépose délicatement.
D'une main je fait ruisseler l'eau sur ces cuisses.
Je trempe le gant (ou la fleur de douche) dans la mousse et le fait glisser sur sa peau, sur son cou et sa nuque, sa poitrine et ses épaules, son ventre et son sexe.
Tout en tendresse, je la caresse, mon doigt se hasardant sur ses lèvres et son clitoris sans qu'elle ne réagisse, ni consentement, ni révulsion.
Alors, je remonte l’éponge sur ses bras et son dos.
Ensuite je fait basculer sa tête en arrière, me saisit du pommeau de douche et arrose ses cheveux.
Je masse son crane lentement avec le shampoing et toujours aucune réponse à mes différent stimulus, même pas un frémissement ou un spasme nerveux. Rien.
C'est en soulevant ses cheveux pour dégager sa nuque que je remarque avec horreur une tache sombre sur sa peau, une sorte de champignon ou de moisissure, une nécrose.
Je pourrais me faire aider...enfin c'est ce qu'ils me diraient, mais si ils savaient, les gens ne comprendraient pas, ils trouveraient tout cela malsain.
Ils me jugeraient, on me ferait interner sans hésiter, peut être même jeter en prison. Devenu un sordide fait divers dans la presse, j'inspirerais certainement le cinéma.
Or, je ne suis pas le Norman Bates du film de Hitchcock.
Une fois rincé et séché, il est maintenant temps de l'habiller.
Qu'est ce que je vais bien pouvoir te mettre aujourd'hui?...Commençons par les dessous. Regardons ce que tu as en lingerie.
Après tout, ce n'est pas parce que tu es...disons que ta condition ne t’empêche pas d'être coquette.
Tandis que je t'enfile un soutien gorge, je me fais cette réflexion : "ça a toujours été plus simple pour moi que de te l'enlever."
Ensuite c'est ton string que je passe sur tes jambes et fait remonter jusqu'à ton sexe imberbe.
Cette vulve sans poils ni trace de repousse, avec ses fines lèvres rosées lui donnerait presque des airs immaculés.
Je lui préfère une jupe à un pantalon, et puis c'est pas comme si elle allait avoir la chair de poule.
En haut? Ce ne sera pas un décolleté pour autant. Non, je trouve que ça fait trop vulgaire.
Quel paradoxe me direz-vous et je vous répondrais par l'argumentaire suivant : sachez que pour moi la lingerie c'est intime, ce n'est réservé qu'à moi et moi seul.
Alors si elle porte un décolleté ce sera accessible à tous.
C'est pour cela que je préfère la voir avec un pull à col roulé...mais bien moulant pour que ce soit sexy!
Par contre pour lui faire enfilé je dois avouer que c'est plutôt compliqué avec la rigidité.
Concernant les chaussures je ne lui en met pas, c'est trop difficile et puis c'est pas comme si elle allait s'en servir pour marcher.
Maintenant, je passe à la coiffure, on va d'abord sécher les cheveux avant de les brosser. Cela abime moins les cheveux et ça les garde plus propres plus longtemps.
J'invente rien, je l'ai lu dans un cosmo!
Et là, je vois de grosse touffes tomber à chaque coups de peigne.
Sa tignasse se clairsème à vue d’œil si bien que l'on croirait maintenant voir le crane d'une femme âgée.
Je ne sais plus quoi faire et j'ai peur d’aggraver un peu plus la situation en tentant encore quoi que ce soit.
Alors je passe au maquillage, de toute manière elle ne verra pas le haut de son crane si je ne lui montre pas.
Par contre son visage face au miroir elle ne pourra pas le louper.
Sa peau est lisse et bien rosé, sans aspérité, je n'ai pas besoin de lui appliquer du fond de teint ou de la poudre.
Un peu de far à paupière, de crayon ou d'eyeliner et elle aura presque à nouveau forme humaine.
Quand je me penche sur son visage pour lui mettre du crayon, elle tourne de l’œil, il se révulse littéralement.
Une fois fini, ses deux yeux restent bloqué dans cette position, laissant uniquement entrevoir le blanc de son globe oculaire.
Je la secoue à plusieurs reprise mais son regard reste tel quel. Avant il était sans vie, aujourd'hui on dirait celui d'un zombie.
Ce n'est juste qu'une poupée, réaliste c'est vrai, mais pas plus vivante qu'un objet.
Elle ne remplacera jamais ma femme, celle avec qui j'ai partagé 22 ans de mariage.
On fait des trucs drôlement étrange quand on est pas bien.
Pour mon deuil, ma psy voyant que je n'arrivais plus à dormir dans mon propre lit depuis, m'a conseillé une thérapie de substitution.
Autrement dit, prendre une poupée gonflable pour combler l'absence physique de ma femme, faire illusion.
Et c'est vrai que pendant un temps, ça à marché. Je retrouvais le sommeil et l’appétit.
Pendant ces dernières années, ma femme était très malade.
Sa santé déclinante la rendait totalement dépendante des autres, surtout de moi.
J'avoue que malgré les difficultés que cela occasionnait, j'aimais m'occuper d'elle.
A son chevet je me sentais utile.
Être dévoué à ma femme était la plus belle preuve d'amour que je pouvais lui donner.
Ça va vous paraitre bizarre et certainement un peu machiste si je vous dis que j'appréciais de l'avoir sous mon contrôle, ou plutôt ma protection.
Je sais aussi que pour certain tout cela leur parait insensé, c'est un peu comme si je prenais un chien après avoir perdu mon enfant et d'un coté vous avez pas vraiment tord.
Quoiqu'il en soit, j'ai beau avoir substitué ma femme à une poupée, le même problème fini toujours par revenir.
La mort me poursuit alors je la fuit. Si cela a marché une fois, je peux peut être la tromper encore une fois?
Partagé par l'envie et la culpabilité qui me rongent, je parcoure l'avenue Pigalle et ses devantures aguichantes.
Non pas comme un gosse devant un magasin de jouet mais plus comme un adolescent en pleine puberté devant les vitrines à prostitués d'Amsterdam.
Il y en aurait bien une ou deux qui m’aie tapé dans l’œil, malheureusement si j'avais le ticket, je l'ai égaré, impossible de me la faire ni échangé ni remboursé.
Quant à la garantie, il n'y en a pas pour les aléas de la vie, rien ne vous en prémuni.
Hélas, bien au contraire, je ne suis ni échangiste, ni libertin, je suis malgré moi fidèle à mon chagrin.
mercredi 14 février 2024
Tous les mêmes
"Thomas" ne pouvait s'en empêcher.
Fallait voir, comment il se comportait sans sa femme pour comprendre, qu'il était un monstre en laisse quand il était avec elle. Être infidèle était sa manière bien à lui d'échapper à l'ennui d'une vie bien rangée : marié depuis plus de 20 ans avec la même femme avec laquelle il avait 2 enfants maintenant adolescents, une maison, 2 voitures et 1 chien. En février des vacances enneigés dans les Pyrénées et en juillet un séjour à l'étranger. Entre ces deux périodes, il fallait combler. Son travail, pour lui, manquait d’intérêt depuis qu'il était affecté au poste de directeur. Il n'y avait plus d'objectif, maintenant qu'il avait atteint le sommet. Cette pensée aurait pu donner le vertige à quelqu'un de moins orgueilleux et de plus mesuré, mais ce n'était pas le cas de Thomas. À ce propos, Thomas c'était comme ça qu'il se faisait appeler sur les sites et applications de rencontre, mais son vrai prénom était Laurent.
Bien que ce soit son visage sur les photos de son profil, il empruntait pour son pseudo le prénom de son meilleur ami, adjoint et confident. Laurent donc, avait l'art de se mettre dans des situations compliquées. Il vous le concéderait lui même, s’il faisait tout ça, ce n'était pas tellement pour le sexe.
Mais plus pour l'adrénaline que la situation lui provoquait, ce petit frisson qui fait accélérer son pouls, redonne une pulsation de vie à son cœur qu'il croyait presque mort. En plus de son gout du risque, il avait aussi un penchant pour les belles femmes et il savait que pour les appâter il fallait employer les grands moyens. Il le savait, avec elles, dire la vérité ne l'aiderait pas à obtenir ce qu'il veut. Des hommes prêts à les satisfaire formaient déjà une file d'attente. Ces femmes, bien que célibataires, ne sont pas pour autant désespérées. Ce n'était pas aussi facile que quand il était ados, ou il suffisait de sortir un beau discours voir même un "je t'aime" pour emballer. Il lui fallait sortir le grand jeu pour la convaincre. Le problème c'est qu'une fois qu'il a tout fait pour l'avoir, qu'il l'obtient enfin ce qu'il désire, il s'en désintéresse. Entre-temps la femme tant convoitée a fini par s'amouracher, elle devient envahissante et parfois imprévisible. Certaines se mettent à l'appeler chez lui, d'autres à passer à l'improviste à son boulot pour lui faire une "surprise". À partir de là, nécessairement il doit s'en débarrasser. Vous l'aurez compris la franchise n'étant pas son fort et au vu du risque que comporte la vérité, il préfère élaborer des stratagèmes de dissuasion voir de dégouts.
Par le passé, il avait déjà essayé la méthode de l'enfant autiste serial killer en devenir. Alors qu'il recevait un énième appel inopportun de sa conquête, il improvisa une situation au téléphone.
"Oh non tu m'as encore ramené un oiseau mort!" lança-t-il à haute voix hors du combiné. De l'autre côté du téléphone, la femme devait surement croire qu'il s'adressait à son chat jusqu'à ce qu'elle demande curieuse "Tu ne m'avais pas dit que tu avais un animal de compagnie?".
Et à lui de répondre "Heu...non, attends, j’ai un problème avec mon fils! Rappelle-moi plus tard chérie s'il te plait." Bien entendu, elle ne le fit jamais.
Dans le même genre, il inventa une autre supercherie, celui de la femme "handicapée". Pour se débarrasser d'une amante un peu trop collante, il eut l'idée de lui envoyer plusieurs photos de sa femme, dont une qu'il avait prise à Noël dernier. Sur l'image on pouvait voir cette dernière posant avec ses cadeaux où on la voyait assise dans un fauteuil en cuir et portant une paire de chaussons neufs. La maîtresse ne mit pas longtemps à remarquer que sur toutes les photos sa femme était en position assise et que ses chaussures n'étaient jamais usées. Prise de remords, elle ne donna plus de nouvelles à Laurent.
Il avait aussi échafaudé un autre subterfuge, celui-ci était bien plus complexe que les deux précédents, mais diablement efficace. Cela consistait à faire croire à sa liaison qu'il était initialement homosexuel, mais que sa rencontre avec elle le faisait douter. Une fois sa crampe tirée, il retournait sa veste en disant que "finalement c'était une erreur, qu'il avait essayée, mais qu'il ne peut pas lutter au fond de lui même, il le sait, il est gay".
Malgré tous ces précédents, il se retrouvait une nouvelle fois dans cette situation. Pourtant, il avait bien préparé le terrain avec Nathalie. La tactique qu'il avait élaborée se résumait à mettre l'accent sur la pression familiale suite à une séparation récente avec sa femme. Il expliqua à sa maîtresse comme quoi sa fille à Noël lui aurait dit "Tu sais papa, mon plus beau cadeau serait que tu te remettes avec maman". Et rebelote au Nouvel An, sa gamine lui avait sois disant souhaitée cette même résolution.
S’il y avait bien une chose sur laquelle il ne mentait jamais, c'était sur le fait qu'il soit père de famille, à un certain âge, il le savait, cela n'était que peu crédible.
C'est ça qui avait plu et convaincu à une Nathalie complètement désabusée. Elle qui au début avait cru être tombé sur un queutard de plus jusqu'à ce qu'il lui raconte "sa situation familiale" et "ô combien il faisait passer le bonheur de ses enfants avant toutes choses". Nathalie pensait avoir enfin trouvé cet homme qu'elle recherchait depuis si longtemps. Sans enfant, la quarantenaire avait priorisé sa vie professionnelle à sa vie personnelle au risque de passer à côté de belles rencontres. Mais aujourd’hui, alors qu'elle était déterminée à ne pas laisser filer Laurent, ce dernier quant à lui, avait choisi de mettre un terme à leur relation. Comprenez par là qu'il avait fui lâchement sans explication. L'infidèle n'avait même pas pris la peine de soigner la mise en scène de sa disparition. Il aurait pu laisser un message sur son répondeur en pleine nuit, mais non, il s'était contenté de changer de numéro de téléphone. Enfin techniquement, il avait laissé la carte sim dans un vieux téléphone qu'il gardait éteint. De sorte à ce qu'il ne soit plus joignable, une fois le répondeur plein elle se ferait une raison et sa propre version de la vérité.
Cela faisait maintenant quelque temps que Laurent faisait profil bas où plutôt profil "désactivé" sur les sites de rencontres. Il était redevenu un mari aimant et vertueux, pour un moment seulement.
Les choses commençaient à se tasser et il allait pouvoir se remettre à la recherche de sa future conquête. Il était dans sa période brunette, la précédente Nathalie était rousse et sa femme était blonde. Avant ça, il avait eu des envies plus exotiques...filles de l'Est, asiatiques, africaines et métisses. Mais son obsession du moment était portée sur les brunes aux yeux noirs, les latines.
Bien sur, si une jeunette qui ne correspond pas à sa recherche venait à le liker voir le superliker, il ne bouderait évidement pas son plaisir. Et c'est exactement ce qui se passa. Son nouveau "match" était une petite blonde de l'âge de sa fille.
"Son petit abricot doit être encore tout rose pâle et ferme, je vais n'en faire qu'une bouchée". C'est la petite remarque à voix haute salace qu'il lâcha en parcourant les photos de son profil. À noter qu'il ne se saurait jamais permis de dire cela en parlant de son enfant.
"Bonjour Margaux, Slt Thomas
Comment vas-tu?
sa va et toi
Très bien, je sors du sport à l'instant.
Envoi une photo des tablettes de chocolat, j'ai un petit creu mdr
Tu es très mignonne sur tes photos. Tu as vraiment 21 ans?
oui pk
Je me demandais juste comme ça.
est toi 46 T vieu
Tu trouves?
Non je rigol tu veu être mon sugar daddy?
Pourquoi pas ahah
Je m'ennui tu fait quoi ce soir
Rien de spécial de prévu et toi?
on peu ce voir si tu veu
Pourquoi pas, tu habites où?
Villejuif
C'est pas loin, je passe te prendre dans une heure si ça te va?
Ok mon num 0645234356
Je t'appelle quand je pars de chez moi bisous"
"Elle est plutôt directe la gamine, j'aime ça! Reste maintenant à trouver une bonne excuse pour m'absenter. Je sais! Et si je prétextais une alarme déclenchée au bureau? Pour gagner encore plus de temps, je pourrais même justifier cela par l'attente du technicien. Bonne idée Lolo, fait donc ça!" se disait le père de famille en même temps qu'il enfilait une chemise propre. Il annonça à sa femme les raisons de son départ en catastrophe et pris le soin de préciser qu'il ne savait pas combien de temps il s'absenterait avant de franchir le pas de la porte. Dans sa voiture, il se parfuma et piocha un chewing-gum dans une petite boite qu'il porta à sa bouche. Il envoya un message via tinder et se mit en route.
Arrivé à Villejuif, il l'appela et il passa la récupérer à l'angle de rue convenue. "Salut daddy!" lui lança la jeune fille quand il ouvrit la fenêtre une fois arrivé à sa hauteur. L'espace d'un instant, il avait l'impression de faire monter dans sa voiture une jeune prostituée russe et comme si c'était le cas, il prit la direction d'un endroit tranquille de sa connaissance. Cette seule pensée déclencha une réaction dans le bas ventre de Laurent ou plutôt une érection. Elle était là, assise sur le siège passager, les jambes et la poitrine laissée nue par sa robe un peu trop courte et décolletée. Pour éviter de trop focaliser sur la peau aguicheuse de la jeune femme, il engagea la conversation timidement. Il réalisa alors que c'était plus facile sur les réseaux sociaux de discuter avec légèreté. Quelque chose le rendait mal alaise, ce n'était pas sa conscience vis-à-vis de ce qu'il s'apprêtait à faire, non, c'était autre chose.
La jeune femme, lui rappelait vaguement quelqu'un, l'avait-il déjà croisé avant? Mais où ? Elle aurait très bien pu être la fille d'un de ses collaborateurs? Ou bien même celle d'une de ses ex fréquentations sur tinder? Qui sait?!
La réponse ne tarda pas à se faire savoir lorsque la jeune femme reçut un appel pendant le trajet.
"Salut Victoria, c'est Margaux, ça va copine?"
L'énonciation du prénom de sa fille comme étant peut être l'interlocutrice de la jeune femme fit plus qu'attirer son attention, cela lui glaça le sang. Son érection retomba immédiatement. "Dis-moi, je me demandais si demain on avait bien amphi pour la socio à 11h?"
Laurent n'en croyait pas ses oreilles, avait-il bien entendu la de sa propre fille voix résonner dans le combiné?
"Super bisous ma belle!" fit Margaux en embrassant le combiné avant de raccrocher.
Le père de famille qui conduisait avait du mal à garder son attention sur la route. Il avait envie de planter la voiture dans un mur. Margaux lui tendit le téléphone en lui disant "tiens tu veux dire un truc à ta fille?!"
Le véhicule pila net, Laurent était sidéré par la scène a laquelle il venait d'assister.
"Ne me regarde pas comme ça! J'aurais très bien pu prendre un selfie avec ta bite dans ma bouche et l'envoyer à Vicky!"
"TU N'ES QU'UNE PETITE SALOPE!"
"Dis donc on se calme hein?"
"QU'EST CE QUE TU VEUX?!"
La jeune femme replissa sa robe et sortit une cigarette.
"J'espère que ça ne te dérange pas" dit-elle en allumant une cigarette avant de poursuivre.
"Voilà, je veux que tu m'achètes tout ce qui est inscrit sur cette liste."
Elle lui tendit un petit bout de papier plié en quatre.
"Un sac Michael Kors noir, une paire de Balenciagas ou de louboutin?
Oui, c'est au choix. En taille 40 ?! J'ai de grands pieds et alors! Continue de lire, ce n’est pas fini!"
"Un iphone X rose, une Apple watch avec son bracelet Hermés, un Macbook pro, une carte cadeau victoria secrets, une mallette de maquillage professionnel de chez Mac, un appareil photo reflex avec un téléobjectif, rien que ça! Sinon tu ne veux pas aussi les clefs de ma 106?"
"Tu vois quand tu veux, tu as un peu d'humour daddy! Bien sûr, si tu ne le fais pas, j'enverrais un screenshot de ton profil tinder avec toutes tes photos et nos conversations. Avec tes photos torses nues, ça va être compliqué de faire croire aux gens que ce n’est pas toi. Ton téton en moins, c'est pire que si tu avais un tatouage sur le pec. Réjouis-toi, ça te coutera toujours moins cher qu'une pension pour tes enfants et un divorce.
C'est donnant donnant, regarde. Avec tout ce qui est dans cette liste, je serais aussi gâté qu'une enfant du divorce et toi ça te permettra d'en éviter un."
Désespérée, Nathalie s'était tournée vers les voyantes et autres charlatans qui moyennant finance étaient prêts à vous raconter tout ce que vous voulez entendre, tous les contes et mensonges possibles et inimaginables. Cependant, la presque veuve était à la recherche de la vérité, c'est tout ce dont elle avait besoin pour faire le deuil de la situation. Pour cela elle était allée au commissariat sans toutefois trouver de réponse à ses questions. Et c'est un peu désemparé, qu'elle se tourna vers un détective privé. Je vous arrête de suite, n'allez pas imaginé un petit cabinet avec une porte en bois vitrée sur laquelle serait inscrit "Le furet enquête privée".
De même que l'homme qui l'accueilla ne portait ni trench ou imper couleur sable, ni chapeau brosalino ou fedora, cela dit il fumait énormément, c'était là le seul aspect qu'il avait en commun avec les personnages de fiction qui faisait la réputation de la profession. À ce titre, il ne fumait pas la pipe comme Sherlock Holmes ni des cigares à la Colombo, non, notre détective était un homme de son temps, il utilisait une cigarette électronique. Quand Nathalie entra dans son bureau, elle exposa son problème au détective tout en tentant de retenir sa détresse. En guise de réponse Le furet, Nicolas de son prénom, plissa les yeux en tirant de grosse bouffée de fumé blanchâtre sur sa vapoteuse. Pendant un court instant, il considéra son interlocutrice en la déshabillant du regard. Son instinct de prédateur lui désignait une nouvelle proie. Par expérience, il le savait les veuves plus encore que les femmes trompées étaient faciles à séduire. Quand l'une avait besoin de se venger, l'autre aspirait juste à être réconforté. Le privé fut interrompu dans sa rêverie perverse par la sonnerie de son téléphone - un thème à la mélodie jazzy joué au saxophone - qui aurait très bien pu être utilisé comme le générique d'une série télévisée dont il serait le héros. Il regarda sur son appareil, pris l'appel en couvrant sa bouche avec sa main et murmura : "je ne peux pas parler là, je suis encore au boulot, on se voit ce soir au club."
Le furet eut un petit sourire en coin en raccrochant et inspira à nouveau dans sa cigarette électronique. Son attention toujours un peu distraite, il se saisit d'un petit carnet et d'un crayon à papier pour prendre des notes.
"Asseyez-vous, je vous en pris mademoiselle, mettez-vous à l'aise."
"Mademoiselle?! Vous rigolez j'ai la quarantaine passé."
"On est jamais trop âgée pour un compliment. Excusez-moi, je ne voulais pas vous faire rougir!"
Mal à l'aise, elle ne put réprimer un sourire gêné.
"Je vous sers un verre d'eau?"
Nathalie refusa poliment d'un geste de la main.
"Bon, je vais avoir besoin de quelques informations pour commencer mon enquête.
Le nom, prénom de la personne que vous recherchez, sa dernière adresse connue, son numéro de téléphone et une photo si vous avez ça?"
"Tout est là." Elle lui tendit une enveloppe.
"Super! Par contre je suis désolé, je vais devoir écourter notre entrevue, j'ai un rendez-vous en ville juste après."
Le détective se redressa, regarda sa montre et enleva son tee-shirt dévoilant ainsi un torse aux muscles encore bien dessiné pour son âge. Nathalie détourna le regard par pudeur, mais curieuse elle se laissa aller à regarder du coin de l’œil. Soudain prise de culpabilité, elle se souvint pourquoi elle était venue ici : retrouver son Laurent bien aimé. Le furet qui ne ménageait pas ses effets prit tout son temps pour enfiler sa chemise à la manière d'un stripteaseur. Ce dernier se rapprocha pour attraper son sac de sport noir qui trainait sous le siège de sa nouvelle cliente. Et quand elle se redressa pour lui faciliter le passage, ils se frôlèrent, se regardèrent l'un l'autre comme s’ils allaient s'étreindre.
Ils n'avaient pas besoin de se le dire, il y avait quelque chose électrique entre eux...mais il y avait bien un "mais" ou plutôt un "mec" celui que le détective était engagé à retrouver.
"Thomas", enfin Laurent avait déjà repris ses mauvaises habitudes. Bien sûr, il était sur ses gardes, encore, plus qu'auparavant. Mais comme je vous l'ai déjà dit en début de nouvelle, il ne pouvait pas s'en empêcher. Néanmoins, il avait mis de côté les sites et autres applications de rencontres. À la place, sa stratégie nouvelle s'orientée autour de son carnet d'adresses et ses vieilles, très vieilles connaissances. Dont l'une d'elles avait répondu partante, en la personne de Claire, 62 ans. Une fréquentation qui avait cessé du jour au lendemain suite à une expérience un peu particulière que Laurent semblait avoir momentanément oubliée. Pourtant à l'époque, la chose l'avait plutôt marqué et c'est peu dire, il avait perdu un téton dans l'histoire. La cougar était adepte de pratique BDSM un peu extrême. Ceci expliquait en partie qu'elle avait attaché Laurent au lit et l'avait gentiment torturé avec une pince. Malgré que le mot de passe fut répété jusqu'à être hurlé, le signal n'avait pas été entendu par sa vieille connaissance, en effet la cougar était atteint de surdité. En dépit de cet épisode douloureux - qui semblait-il n'avait pas laissé de souvenir traumatisant outre l'imposante cicatrice - Laurent se retrouvait une nouvelle fois au lit avec Claire. Pour sa défense et si ça peut vous aider à le comprendre, notre homme accumulé énormément de frustrations sexuelles depuis quelque temps.
Sans compter qu'il avait besoin "d'évacuer toute cette tension" qu'occasionnait le chantage de la jeune Margaux. Et puis il avait une revanche à prendre sur le lit à baldaquin de Claire qui semblait s'être mué exceptionnellement en cage de MMA. Alors qu'il lui assenait des coups de reins comme autant de coups de poing, la cougar prenait son pied, mais semblait toujours autant insatiable. Intérieurement, il souhaita la baiser si violemment que cela provoquerait un infarctus ou un AVC à sa partenaire. Hélas, plus il y allait fort et plus elle prenait du plaisir. Cela exaspéra tellement notre homme que ça sa soif de domination se mua en une colère sourde. Il en perdit son sang froid, il ne contrôlait plus ses gestes. Laurent qui exécutait une levrette un peu étrange - sa partenaire avait la tête enfouie dans le matelas et maintenue ainsi par le pied de ce dernier appuyé sur sa joue - la sodomisa profondément pour assoir son autorité. Totalement soumise, elle s'abandonna et ne put contenir le geyser de sang et de merde qui jaillit par son anus. Dans la panique et en voulant certainement reboucher brutalement l'orifice, il se péta littéralement la bite.
Le Furet avait retrouvé la trace de "Thomas" facilement.
Sans dévoiler les astuces du détective, il avait déduit que le prénom donné à sa cliente était faux. Pour se faire, il prit contact avec une connaissance qui travaillait justement pour l'opérateur téléphonique auquel était rattaché le numéro. Moyennant un petit billet, celui-ci lui communiqua l'identité et l'adresse du client à laquelle était déclarée la ligne. Tout cela avait permis à l'enquêteur privé de prendre "le disparu" en filature de son domicile à celui de sa maitresse et jusqu'à l'hôpital. Aux urgences, une poche à glace sur ses attributs, Laurent attendait le résultat de l'échographie. Quand le médecin revint enfin vers son patient, il lui diagnostiqua une fracture du pénis, le syndrome de l'aubergine. C'est à ce moment bien précis, quand Laurent était le plus vulnérable que le détective et sa démarche nonchalante entrèrent en scène.
"Je ne m’attendais pas à vous rencontrer dans de telles circonstances"
"Pardon?!"
"Faut dire que c'est un peu cocasse ce qui vous arrive."
"Je suis tombé à vélo..."
"Va falloir trouver une meilleure excuse/histoire à raconter à votre femme. Si je peux me permettre un petit conseil...aujourd'hui, vous avez la bite pétée, mais demain à trop jouer avec le feu, vous allez tomber sur une folle qui vous l'arrachera en vous suçant pour se venger!"
"Mais vous êtes qui au juste ?"
"Votre meilleur ami en ce moment, c'est moi qui vous le dis!"
"Ha bon?"
"Parce que les vrais amis sont là quand on est dans la merde et visiblement ça semble être votre cas" Le Furet lui tendit sa carte de visite avec un sourire en coin.
Laurent lu la carte à voix haute "Détective privé?"
"Exact, croyez-le ou pas, je peux résoudre tous vos problèmes!"
"Et vous comptez vous y prendre comment?"
"Déja il faudrait par finir ce que vous avez commencé..."
"Cet à dire" Laurent coupa le détective.
"Votre idée de vous faire passer pour mort aux yeux de Nathalie n’était pas si mauvaise en soi, je dois bien l'avouer, mais il fait amateur. Tout ça manque de preuve.
C'est pourquoi je vous propose de me procurer de faux documents comme un dossier médical et un acte de décès que je fournirais à ma cliente. Je peux même produire un journal réédité daté d'y a deux semaines avec une rubrique nécrologique modifiée. Tout est possible, c'est vous qui voyez. La limite, c'est ce que vous permet votre budget."
"Et justement, ça va me couter combien tout ça?"
"Bien évidemment, tout ça à un certain prix vous l'imaginez et puis ce n'est pas sans risque non plus. Je peux perdre mon assermentation"
"Combien!"
"Disons 6 000 euros et considérez que je vous fais un prix si vous me garantissez de ne jamais plus rentrer en contact avec Nathalie."
"Est-ce que j'ai vraiment le choix?!"
"C'est vous qui voyez! On peut également pousser le concept encore plus loin, on pourrait par exemple acheter un caveau/emplacement dans un cimetière ou une concession funéraire, mais là encore cela va faire augmenter la facture comme vous l'imaginez. Voyez ça comme un investissement, au lieu d'acheter un studio ou des places de parking, la au moins ça sera rentable après votre mort. L'avantage c'est que vous ne payerez pas de frais de copropriété. Et pas de problème de voisinage bruyant non plus à prévoir!
"J'ai encore un autre problème à régler, quitte à faire appel à vous autant me débarrasser de tout."
"Je vous écoute, Laurent."
"Y a une copine de ma fille, elles sont à la fac ensemble, qui me fait du chantage depuis qu'elle a trouvé mon profil sur tinder..."
"Ok, il va falloir que vous procuriez son identité et son numéro de téléphone."
"Je peux vous avoir ça."
"Super! Pour le reste et les détails, on verra plus tard."
"Qu'on soit bien d'accord, toute cette histoire sera notre secret!"
Le Furet fit un clin d'oeil et mima une fermeture éclair imaginaire sur sa bouche en signe d'approbation avant de s'éloigner.
"On se recontacte, tombeur!" lança-t-il à Laurent puis tira sue sa vapoteuse et recracha la fumée en murmurant pour lui "Tu t'es bien fait baiser!".
Non loin de là, mais à une distance suffisante pour ne pas se faire repérer, la femme de Laurent assistait à la dernière interaction des deux hommes. Du peu qu'elle avait pu observer, Sarah se fit un avis bien tranché de la situation. Bien qu'elle était sous le choc de cette révélation, elle n'était pas complètement surprise par la nouvelle non plus. En effet, avant ça Sarah était déjà en proie à un doute grandissant sur la question. Ce qu'elle venait de voir en était simplement la confirmation : Laurent, son mari était un homo qui affectionnait les pratiques sados masos.
Depuis quelque temps, elle avait remarqué des petits changements dans son comportement : il prenait plus soin de lui et avait renouvellé entièrement sa garde-robe.
Logiquement, à l'époque Sarah avait imputé cela à une crise de la quarantaine.
Et quelle triste ironie, pour cette femme qui plaisantait souvent avec son mari, sur le fait qu'il se découvrirait homo à la quarantaine!
Si un jour on lui avait dit que cela se réaliserait, elle ne l'aurait pas cru, elle en aurait même rigolé.
C'était peut-être ça le pire dans l'histoire. Sarah ne lui en voulait pas autant qu'elle s'en voulait à elle même de ne pas l'avoir vu, alors que c'était juste sous ses yeux.
"C'est vrai qu'il m'a trahie, mais ce n'est pas comme s'il l'avait fait avec une femme plus jeune et plus jolie.
Bien sûr, ce n'est pas très flatteur de savoir que son, mari s'est détourné des femmes pour les hommes." Se consola-t-elle.
Chacun sa façon de voir le verre, à moitié vide ou à moitié plein. La femme de Laurent poursuivit son introspection durant le trajet de retour au foyer familial. Elle estimait qu'il avait été plutôt discret pendant toutes ces années...à vrai dire elle ne s'était jamais trop posé de question sérieusement, sauf peut-être cette fois où il s'était arraché la moitié d'un téton "en se rasant". Sarah en avait presque pitié de lui, elle s'imaginait qu'il devait tellement se détester au fond de lui même, à se livrer une vraie bataille intérieure pour lutter contre sa vraie nature. Tout ce machisme et cette virilité exacerbée n'étaient en fait qu'une façade selon Sarah. Quoi qu'il en soit, sa décision était prise et cela était mieux pour lui comme pour elle. Sarah n'allait tout de même pas attendre qu'il fasse son coming out et devenir ainsi la risée du voisinage. À peine Laurent avait-il mis un pied au-delà du pas de la porte qu'il entendu son prénom que sa femme appelait depuis la cuisine.
Sarah l'attendait attablée dans une ambiance tamisée par la lueur des chandelles.
"Coucou ma chérie, quelle surprise! tu as fait quoi à manger ?"
Il traversa la pièce avec sa veste devant lui pour cacher son entre jambes.
"Alors en entrée nous aurons des aubergines grillées suivies de croques monsieurs et pour le dessert des bananes flambées! C'est à ton gout mon chéri?"
Le mari adultère se sentait pris au piège, il voulut desserrer son nœud de cravate, mais ses mains tremblaient trop pour y parvenir.
"Je suis passée à la boulangerie pour acheter des pâtisseries, mais ils n'avaient plus de "divorcés" alors je n'ai rien pris."
Si avec ça, Laurent n'avait pas compris le message...cependant sa tactique consistait quand même à faire l'ignorant. Avec un peu de chance et un bon concours de circonstances, il espérait même se faire passer pour innocent. Laurent n'était pas du genre à avouer ses méfaits par culpabilité. Non, il était de ses personnes qui le nez dans la merde vous affirmerez que c'est de la mousse au chocolat.
Au passage, c'était son dessert préféré, mais hélas pour lui, ce n'était pas au menu de ce soir.
Sa femme le connaissait par cœur et savait par conséquent que tant qu'elle ne provoquerait pas la discussion, son mari ferait comme si de rien n'était. Après tout, tant qu'il ne passait pas aux aveux, il n'était pas coupable. Summum de la vilenie, il se terrait dans le silence.
Aussi lâche qu'inutile, cette stratégie - si un jour avait-elle marché ? - ne le tirerait pas d'affaire cette fois. Cependant elle lui éviterait peut-être de s'expliquer. Et c'est bien cela qu'il essayait d'éluder, car il le savait bien, aucune des justifications qu'il avait inventées n'était suffisamment crédible pour convaincre sa femme. Quand Sarah lui balança tout ce qu'elle savait, malgré les cris, les pleurs et les assiettes cassées il fut presque soulagé d'apprendre qu'elle (ne savait pas la vérité) s'était trompée.
Bien sûr, il allé devoir galéré pendant quelque temps, mais le pire allait être évité. Enfin, si le détective s'occupait correctement du problème avec Margaux, la petite jeunette, la copine de Fac sa fille.
Après avoir traiter de tous les synonymes et insultes faisant référence à l'homosexualité - ce qui il faut l'avouer était une sacrée punition pour notre hétéro macho - son mari, Sarah décida d'aller se réfugier chez sa sœur et claqua la porte de la maison. Laurent entendit la voiture démarrée en trombe puis pilée brusquement suivie d'un grand bruit métallique.
Le détective Le Furet avait donné rendez-vous à Nathalie dans un café en prétextant un compte rendu d'enquête. Pourtant, une fois sur place la quarantenaire n'avait pas l'impression qu'elle était conviée pour parler de la disparition de "Thomas". Bien au contraire, l'enquêteur semblait jouer la carte séduction avec sa chemise déboutonnée qui laissait entrevoir ses pectoraux.
Ce qui attira particulièrement l'attention de sa cliente, c'était l'élégant costume sombre dont il était vêtu, lui qui d'habitude portait un jean et tee-shirt. Et bien qu'elle trouve très séduisant dans cet apparat, elle sentait que tout cela était de mauvais augure. Le Furet avait amené avec lui un joli bouquet afin de tester les réactions de la quarantenaire. Pour le moment, il tâtait le terrain à défaut d'autre chose. Sa manœuvre était simple, si Nathalie lui demandait pour qui étaient les fleurs, cela voudrait signifier qu'elle est ouverte à la séduction. Dans le cas contraire, cela indiquerait qu'elle était encore trop endeuillée pour s'en rendre compte auquel cas il les lui donnerait pour déposer sur la tombe du défunt. Une fois leurs cafés consommés, Le Furet en parfait gentleman régla l'addition et suggéra une balade dans le quartier. Nathalie ne tarda pas à voir ses craintes se confirmer quand elle comprit qu'ils prenaient la direction du cimetière.
Ce n'était pas le meilleur moment et pour plusieurs raisons :
La première étant qu'elle gardait encore un infime espoir de le retrouver vivant, la deuxième à cause de ce gros nuage noir menaçant qui était au-dessus de leurs têtes.
Notre détective séducteur avait pensé à tout, ne soyez donc pas surpris de savoir qu'il l'invita Nathalie à s'abriter sous son parapluie. La pluie battante appuyée par de puissantes bourrasques de vent encourageait la jeune femme à se blottir contre le détective. Parce qu'elle se sentait protégée, il l'a pensé vulnérable et espérait bien profiter de la situation.
Avant de franchir les grilles du cimetière, le détective s'arrêta et lança un regard désolé à sa cliente.
"Je suis navré Nathalie, les réponses que vous attendez ne sont pas celles que vous espériez..."
Ils avancèrent dans les allées de tombes jusqu'à arriver à une stèle fraichement fleurie située un peu à l'écart, sur une parcelle vierge. Sur le marbre est inscrit "Thomas VERDIER 1967-2019".
Une fois de plus, Le Furet avait anticipé ses besoins en sortant un mouchoir de sa poche. Et ce simple geste marqua le début des pleurs de la désormais célibataire.
"J'ai pensé que vous aimeriez déposer des fleurs, si vous voulez inscrire quelques mots sur la carte, je dois avoir un stylo..."
Le détective retira sa main empathique posée sur l'épaule de sa cliente et de l'autre lui tendit le bouquet. C’en était trop pour Nathalie qui s'effondra à genoux comme sous le poids de sa tristesse.
Naturellement, Le Furet proposa de la raccompagner chez elle et à sa plus grande surprise cette dernière préféra un endroit dans lequel elle n'avait pas de souvenir avec Thomas. C'est donc en toute logique qu'ils se retrouvèrent chez le détective.
Une fois dans l'appartement de ce dernier, les choses prirent une tournure "presque" inattendue pour le détective. La quarantenaire lui sauta littéralement dessus, arrachant pratiquement ses vêtements en l'embrassant. Expert, Le Furet glissa ses doigts entre les jambes de la belle et constata que ses dessous étaient trempés. Alors qu'il commençait à la tripoter, elle s'ouvrir comme une fleur et fit de petits gémissements. C'est à ce moment précis que l'homme malicieux décida de s'interrompre pour demander : "Je ne voudrais pas que tu penses que je veux profiter de ton deuil pour coucher avec toi, Nathalie. Si on le fait, je veux que ce soit parce que tu en as vraiment envie."
"Non, ne t'inquiètes pas, j'ai juste besoin de me défouler, de passer à autre chose, d'oublier."
"C'est cool, alors vas-y utilise moi!"
Laurent ne pouvait plus faire machine arrière, il ne disposait plus de plan de secours, ils les avaient tous épuisés, de B jusqu'à Z. Depuis qu'il s'était fait passé pour mort auprès de Nathalie, une série d'événements infortunés l'avait frappé. Chaque coup du sort semblait faire écho avec une certaine ironie à son comportement passé. D'abord sa femme qui se retrouvait handicapée, puis son fils qui se la jouait pervers sexuel dans les toilettes de l'école, ce serait quoi ensuite?
À ce sujet, la directrice avait convoqué Sarah et Laurent et c'est pourquoi ce dernier venait chercher sa future ex-femme. La pauvre en fauteuil ne pouvait plus se déplacer toute seule et c'est donc Laurent qui avait gardé le monospace depuis l'accident. C'était aussi l'occasion pour lui de venir souhaiter un joyeux anniversaire à sa fille. Hélas, entre son entreprise à gérer et les aller-retour de l'hôpital à chez lui, il n'avait pas eu le temps de trouver un nouveau cadeau. À la base il avait prévu de lui offrir une voiture pour ses 20 ans, mais dans de telles circonstances, vous imaginez que cela aurait était mal venu. Laurent s'excusa auprès de sa fille de ne pas lui avoir apporté de cadeau et celle-ci lui répondit que "son plus beau cadeau serait qu'il se remette avec sa mère".
Pris soudainement de sueur froide, le père bredouilla "Malheureusement ma chérie, tu le sais ça ne dépend pas que de moi" et une petite voie intérieure lui glissa ",mais c'est entièrement de ma faute".
Cette scène ne vous rappelle pas déjà quelque chose?! À Laurent, oui, cette ironie de situation résonnait en lui comme une bonne leçon de vie. Pour éviter le malaise, il s'isola dans le jardin pour passer un appel au détective.
"Où en sont mes problèmes?"
"Ne vous inquiétez pas, ils seront bientôt tous résolus...je vais m'en occuper ce soir, vous allez pouvoir reprendre votre vie d'avant."
"J'aimerais bien, oui."
Visiblement exténué, le mari raccrocha sans avoir mis un terme de façon courtoise à la conversation.
Le Furet ne lui tenu pas rigueur de cette réaction impolie, au fond il comprenait son client. Celui qu'il avait d'abord envisagé comme potentiel rival, jusqu'à ce qu'il s'en serve d'appât. Loin de culpabiliser, il n'avait en général que peu d'empathie et encore moins de conscience, mais avait développé pour lui une forme de sympathie. Après tout, il partageait également cette lassitude vis-à-vis de Nathalie, elle semblait plus séduisante et plus spirituelle tant qu'il ne l'avait pas baisé. Mais une fois que cela avait été fait, elle avait perdu toute saveur, elle était fade comme le fruit du dragon avant de le gouter pour la toute première fois. La verve attractive des discussions s'évanouissait, mais le fait est qu'elle n'était pas à la hauteur de ses promesses - qu'elle n'avait pas faite - y était pour beaucoup. Certes, elle avait un corps plaisant qui la faisait paraitre plus jeune, mais la quarantenaire ne savait apparemment pas s'en servir. À quoi bon l'expérience sans la maitrise, me direz-vous.
Pour vous donner un exemple : en levrette elle faisait le dos rond et si elle vous sucez...he bien...elle le faisait dans le noir. Alors qu'avec son seul regard, en vous fixant droit dans les yeux, elle aurait pu vous faire finir. Et justement, en parlant de finir, Nathalie avait cette façon de jouir bruyamment - pour ne pas dire en hurlant - qui pouvait faire sourire la première fois, mais rapidement devenir insupportable. Un peu comme pourrait devenir agaçant une femme fontaine et le rituel du changement de draps à chaque fois. En bref, Nathalie n'était pas à la hauteur de ce qu'il espérait, Le Furet le reconnaissait, il s'était déçu tout seul avec ses propres attentes.
Sur le trajet pour la réunion avec le proviseur du collège de leur fils, un lourd silence demeurait dans l'habitacle. Laurent dont l'attention focalisée sur la route ne risquait pas d'être détournée par une discussion avec sa future ex-femme remarqua une voiture dans son rétroviseur. C'était la voiture de Nathalie, du moins elle était du même modèle et de la même couleur. Le véhicule gardait toujours une distance d'une vingtaine de mètres ce qui rendait difficile pour Laurent de voir qui l'a conduisait ou de lire la plaque d'immatriculation. Rien de sur cependant, il fallait qu'il garde son sang froid et ne cède pas à la paranoïa. Il se demandait depuis quand cette voiture était derrière lui.
Le suivait-elle ? Ou était-ce une simple coïncidence?
Avec ce qui se passait dans sa vie ces derniers temps, il sombrait peu à peu dans la paranoïa la plus totale. Laurent ne pouvait pas se permettre une énième situation problématique. Il accéléra pour franchir le feu qui passait du orange au rouge et freina d'un coup sec en voyant une voiture de police qui attendait à l'angle. Sarah engueula violemment Laurent, mais ce n'est pas pour cela qu'il porta ses mains à son visage comme pour se protéger. C'était pour cacher sa tête, car la voiture de Nathalie était arrêtée à leur hauteur et il ne voulait pas qu'elle le voie. Laurent avait peur d'être démasqué.
Mais pour la première fois depuis bien longtemps, la chance lui sourit. À son plus grand soulagement, la quarantenaire ne fit pas attention et redémarra tranquillement. Il l'a regarda s'éloigner comme si elle était un fantôme alors que si vous avez bien suivi, techniquement ce serait plutôt lui, le spectre.
Nathalie était en route pour le cabinet du détective, elle aimait bien faire des visites à l'improviste.
Une petite surprise de temps en temps, pour elle, était nécessaire pour entretenir la flamme.
Le Furet avait réussi à rentrer en contact avec la mère de Margaux et l'avait convaincue de venir avec lui à son bureau. Il l'avait attaché et suspendu au-dessus du sol à l'aide de grosse corde. L'enquêteur envoya une vidéo prise avec son téléphone à son client. Évidemment, Laurent exultait, il tenait sa revanche et transféra sans tarder la chose à celle qui le faisait chanter depuis le début. Dans son message, il avait joint à la vidéo cette légende : "Finalement Margaux, tu devrais être contente. Tu vas devenir à ton tour une enfant du divorce."
Sur l'enregistrement on pouvait entendre - bien qu'elle soit bâillonnée - les gémissements de douleurs plaisantes et plaisirs douloureux de sa mère. Depuis la pièce attenante au bureau faisant office de salle d'attente, Nathalie qui venait d'arrivée croyait entendre ce qui n'était pas des pleurs de tristesse. Naïvement, elle pensa à un énième constat d'adultère puis regarda le gros sac de sport noir. Elle le reconnaissait, c'était celui que Le Furet emmenait pratiquement partout avec lui et il était partiellement ouvert. La quarantenaire jeta un coup d’œil furtif à l'intérieur, bien sûr elle ne voulait pas fouiller dans ses affaires, mais elle devait savoir, ne serait que pour se rassurer. Et quelle fut sa déception quand elle découvrit qu'il était rempli de sachets de lubrifiant et de sex-toys en tout genre. Folle de rage, c'est alors qu'elle fit irruption dans le bureau et surprit les obscénités auxquelles s'adonnait Le Furet. Nathalie n'en croyait pas ses yeux. Écœuré, la quarantenaire claqua la porte du cabinet en partant et soupira : "tous les mêmes".